dimanche 10 avril 2016

LE REPORTAGE DE CAPITAL AU SUJET DE LA SURELEVATION

VOS TOITS VALENT DE L'OR

Le magazine Capital sur M6 a consacré une émission spéciale sur la maison comme source de revenu supplémentaire. L'un des volets de l'émission était consacré à la surélévation, nouvel Eldorado. 

Le reportage aborde la surélévation sous ses différentes facettes :

Premier cas de figure : la surélévation d'une maison individuelle à 25 kilomètres de Lyon pour qu'une famille s'agrandisse. Nous ne nous attarderons pas sur cette partie du reportage qui ne présente pas beaucoup d'intérêt pour nous car la surélévation consiste ici en un pastiche de la maison existante, il n'y a pas donc aucun apport créatif.

En effet, ce qui nous intéresse dans le processus de surélévation est de partir de l'existant pour proposer une nouvelle projection architecturale à la fois harmonieuse et inédite ;

Deuxième cas de figure : la surélévation de dents creuses en zones urbaines telles que Paris, à savoir, des immeubles plus bas que ceux qui les entourent. Nous sommes au cœur du sujet ! Nous regrettons l'incohérence du reportage qui nous présente l'unique illustration d'une surélévation réalisée en 2007 par les architectes talentueux Hardel et Le Bihen alors même que nous sommes en 2016 et que, dans le même reportage, à la 37ème minute et 27 secondes, il nous est rappelé qu'il y a eu en 2014 plusieurs milliers de surélévations réalisés. Pourquoi ne pas nous avoir montré une extension plus récente?

Troisième cas de figure : le travail d'un promoteur intéressé par le rachat de droits à construire d'une dent creuse dans le 15ème arrondissement de Paris, à savoir, un  immeuble en copropriété de 2 étages afin d'y rajouter 3 étages supplémentaires. Ce qui porterait à 5 le nombre total d'étages. Le reportage indique que le promoteur est entré en contact avec le syndic de copropriété pour lui faire une proposition de rachat de ses droits à construire. Erreur : c'est au syndicat des copropriétaires (12 copropriétaires en l'espèce) que le promoteur adresse sa proposition et non le syndic qui n'est qu'un professionnel en charge de la gestion de l'immeuble et mandaté par le syndicat...

Le promoteur souhaite rémunérer la copropriété à 640 € le m² constructible pour un total de 258 m² de surface habitable constructible  soit environ 165 000 € de gain pour la copropriété.  Autour de 7200 € le m² (ancien ou neuf), le promoteur empocherait à la revente 1 860 000 € selon les dires du journaliste de CAPITAL. Sur le site Meilleursagents.com, qui référence les prix au m² en fonction des ventes immobilières, il nous est indiqué qu'au 36 rue Dantzig, 7200€ correspond au à la fourchette la plus basse du prix au m² des appartements dans l'ancien.
Or, les 3 étages supplémentaires créés par surélévation seront des logements neufs, répondant aux règles de construction du neuf.  Le prix à la revente sera donc, en toute logique, plus élevé que 7200€...

Les journalistes se sont livrés à un calcul que nous qualifierons de sommaire pour estimer la rentabilité de l'opération et le bénéfice du promoteur :

Les dépenses du promoteur déduites des 1 860 000 € de gain :
       165 000 € le rachat des droits à construire 
+  1 140 000 € les études techniques, les travaux et les honoraires de l'architecte
__________________________________________________________________________________
= Soit un total de 1 305 000 € de dépenses,

Soit une recette de 555 000 € (sous-estimé si on part du principe que le prix de revente au m² est supérieur).

Nous trouvons dommage que la méthode juridique de rachat des droits à construire n'est pas été abordé, ainsi que tout ce que cela implique (modification des tantièmes de copropriété, assurances, travaux, rôle du syndic, etc.).

Nous ignorons par ailleurs, si dans les études techniques, le coût des renforts structurels nécessaires pour que l'immeuble puisse porter cette charge supplémentaire est ou non inclus.

Dans la présentation du projet par le promoteur à l'assemblée générale de copropriété,  on s'aperçoit que la création d'une cage d'ascenseur est prévue puisqu'en théorie, tout immeuble d'habitation collectif neuf de plus de 3 étages doit posséder un ascenseur (Article R111-5 du Code de la Construction et de l'Habitation). La surélévation étant, de manière générale, contrainte par là règlementation du neuf, les étages nouvellement créés doivent être accessible par un ascenseur (sauf demande dérogatoire).

Il semblerait que la copropriété ne donne pas suite en l’état au projet de cession de leurs droits à construire en surélévation.

Quatrième cas de figure : la surélévation des échoppes à Bordeaux avec l'exemple d'un propriétaire qui souhaite surélever son échoppe pour construire 28 m² supplémentaires... Son projet est contraint par les règles locales d'urbanisme. La surélévation ne doit pas être visible de la rue principale afin de ne pas dénaturer l'aspect des échoppes vu de l'extérieur.

Cinquième et dernier cas de figure : un projet de surélévation porté par un copropriétaire du dernier étage qui souhaite agrandir son appartement en créant 2 niveaux supplémentaires, soit un triplex). Ce projet arrêté net par les Architectes des bâtiments de France qui ont jugé qu'il ne s'intégrerait pas assez harmonieusement au paysage urbain et tout particulièrement aux deux théâtres classés situés à moins de 500 mètres du projet de surélévation.

Conclusions du reportage : uniquement 1200 surélévations à Paris ces 20 dernières années... un nombre qui devrait fortement augmenté avec l'adoption du futur plan local d'urbanisme (PLU) en juin prochain...

Nous ignorons si le nouveau PLU favorisera les surélévations dans la mesure où les échos que nous avons du projet de PLU est qu'il n'augmentera pas les plafonds de hauteur actuels.

En revanche, nous savons que les surélévations sont déjà en constante augmentation à Paris comme le montre l'étude de l'APUR, à partir de la page 43.


Affaire à suivre donc...


Vous pouvez visionner l'intégralité du reportage ici 



Illustration de la dent creuse du 5ème et dernier cas de figure évoqué ci-dessus

La dent creuse en question remplie  // Architecte Etienne Maillard